Le nouveau mot d’ordre n’est plus « stratégie » mais « bien commun » et « responsabilité sociétale »
Nous entrons dans une nouvelle ère de l’entreprise avec une conception tournée vers l’intérêt général. La construction de la raison d’être s’articule dorénavant autour de deux axes fondamentaux : l’intérêt de l’actionnaire et l’intérêt du bien commun. Elle est le résultat d’une vocation business et d’une innovation sociétale. La raison d’être remplace désormais la vision stratégique de l’entreprise. Et pourtant, de nombreux échanges, articles et études permettent de constater, de la part des dirigeants d’entreprises, des hésitations à s’engager, des difficultés à définir leur propre raison d’être, une incompréhension quant à la portée de la raison d’être sur la gouvernance ou encore… le risque de ne pas s’y engager. Il s’agit d’ajuster la gouvernance.
Des enjeux stratégiques
Les dirigeants d’entreprise sont soumis à une pression sociale, sociétale et humaine sans précédent. Les investisseurs, les fournisseurs, les clients, les hauts potentiels, l’ensemble des collaborateurs, et notamment les nouvelles générations, attendent de l’entreprise qu’elle exprime une raison d’être ancrée sur de nouveaux engagements placés au cœur de la gouvernance. Une croissance durable dépend du rôle et de la place de l’entreprise dans la cité : l’entreprise est dans la société et la société est dans l’entreprise. La financiarisation de l’économie a eu tendance à nous faire oublier que toute entreprise a une raison d’être : apporter une contribution positive à la société, chacune dans son domaine d’excellence, pour soutenir l’accès du plus grand nombre de personnes aux biens fondamentaux et à l’amélioration des conditions de vie. Cette métamorphose de l’entreprise et la rapidité des changements conduisent les conseils d’administration à repenser leur stratégie et leur vision pour faire de la raison d’être un véritable avantage concurrentiel. Rester attractive et survivre à l’échelle mondiale dépend dorénavant, pour l’entreprise, de sa raison d’être. Elle doit être la boussole qui définit le cap, donne à l’entreprise un nouveau sens, dessine une ambition collective, une vision partagée de son futur.
Des dérives à anticiper
Il faut nécessairement faire la différence entre une raison d’être cosmétique et une raison d’être stratégique. L’utilisation de slogans publicitaires, l’organisation d’événements ad hoc, le « relooking » d’entreprises en difficulté, ont contribué ainsi à fausser la donne d’un nouveau souffle de l’entreprise. La raison d’être détermine un objectif majeur : fixer les nouvelles orientations incarnées par les dirigeants. Le devenir de ce qui s’avérait un véritable outil de management et de gouvernance apparaît cependant bien fragile. L’histoire des individus, des organisations et des cultures montrent que nous ne cessons d’évoluer du stade de l’enfant qui se projette dans l’avenir, à celui de l’adolescent capricieux en quête d’identité, de celui d’adulte ouvert au monde capable de forger son destin à celui du vieillard sage et distant. Au-delà de ces stéréotypes se nichent les forces puissantes de la maturation. La raison d’être fait partie de celle-ci : elle est ce qui reste à l’entité mûre pour continuer à avancer quand on a tout perdu. Le passage de la RSE à la raison d’être, incarne le passage du 20e au 21e siècle.
Une cause transnationale
Il faut laisser du temps au temps. La raison d’être n’est pas une option : elle est une nécessité, la clé de voûte d’une exigence citoyenne pour la gouvernance. Au fond, la finalité de la raison d’être est de réaliser un rêve : celui de restaurer l’image des entreprises incomprises et insuffisamment appréciées pour modifier enfin le regard que nous portons sur le monde de l’entreprise. C’est parce qu’une entreprise est utile qu’elle est prospère, et non l’inverse. L’entreprise profite à tous ceux qui y contribuent : ses salariés, ses actionnaires, ses clients… mais aussi à ses fournisseurs et au territoire sur lequel elle est implantée, et aux générations futures. La raison d’être repose avant tout sur l’impulsion de valeurs qui contribuent à redynamiser les ressources humaines. C’est plus qu’un concept : son originalité est d’impliquer l’ensemble des collaborateurs pour créer un moteur d’intelligence collective. Tous ces aspects seront illustrés aux participants du certificat 2020/2021 en gouvernance d’entreprise qui débutera en septembre prochain auprès de HEC Liège.
Bruno ABBATE
Mail : bruno@gubernantia.eu
Ingénieur de gestion (promo 1988)
Réviseur d’entreprises honoraire
Expert-Comptable
Administrateur de sociétés certifié
Expert Judiciaire auprès du Tribunal du Grand-Duché de Luxembourg
Intervenant sur le Certificat d’Université en Gouvernance d’entreprise – HEC Liège