Les entreprises sociales comme source d’inspiration pour des modèles d’entreprises plus résilients

Par leur connaissance des entreprises sociales, Virginie Xhauflair et Sybille Mertens, chercheuses au Centre d’Economie Sociale (CES) et professeures à HEC Liège, amènent de nouvelles perspectives dans notre conception du développement durable.


De quelle manière approchez-vous le développement durable dans le ‘Master en gestion des entreprises sociales et durables’ et dans le ‘Master de spécialisation en économie sociale’ (organisé avec l’UCL) proposés à HEC Liège ?

Sybille Mertens : Historiquement, en suivant la voie tracée par Jacques Defourny, nous avons choisi de nous intéresser au développement durable à travers les formes très alternatives d’entreprises que sont les entreprises sociales. Par entreprises sociales, on entend des entreprises qui combinent des impératifs de rentabilité avec l’intention de répondre aux enjeux de société. Pour ne citer que quelques exemples emblématiques du paysage liégeois, on peut penser aux Grignoux, à Vin de Liège, aux Ateliers Jean Del’Cour, aux Petits Producteurs, … Ces entreprises sociales développent des modèles économiques performants délimités par un cadre qui, d’une part, empêche de détruire la planète et qui, de l’autre, s’appuie sur un socle social stable et qui respecte la dignité des personnes.

Virginie Xhauflair : Une autre caractéristique des entreprises sociales réside dans leur faculté à expérimenter. En véritables pionnières, elles répondent à des besoins qui n’ont pas été détectés par les entreprises conventionnelles et par là, permettent de transformer certains marchés et même d’en créer de nouveaux. Ces expérimentations ont trait à de nouvelles pratiques de gouvernance, d’affectation du profit, de relation avec les parties prenantes, et servent généralement des logiques plus collectives, plus participatives. Notre conviction est que ce type d’entreprise peut, grâce à ces expérimentations, inspirer les entreprises traditionnelles qui auraient la volonté de repenser leur modèle et leurs pratiques.

Les cours dispensés au sein des Masters se basent en grande partie sur les recherches menées par le CES. Quelle est son approche spécifique ?

SM : Notre centre de recherches est un laboratoire qui a pour objet l’étude des formes alternatives d’organisations. Les observations que nous faisons permettent de tirer des conclusions qui peuvent s’appliquer à d’autres entreprises telles que des PME. On remarque notamment que lorsqu’une entreprise accorde une attention particulière au bien-être des travailleurs, à l’environnement, aux relations avec les fournisseurs, cela a bien sûr des répercussions au niveau du profit qu’elle peut réaliser, mais il en découle surtout des formes d’organisations plus résilientes avec, notamment, une plus grande loyauté des consommateurs et des travailleurs, un meilleur ancrage local, …

Vos étudiants bénéficient de la réelle complémentarité de l’équipe professorale en matière de développement durable. Quelles sont les expertises des enseignants ?

VX : Sybille Mertens analyse les types de business models durables et leur financement hybride, et Charlotte Moreau complète cette perspective en abordant les dimensions de GRH et de gouvernance. Michel Boving est consultant en stratégie et il revisite les outils classiques en les appliquant à des modèles complexes où s’articulent impératifs économiques et réalité sociétale. Par ailleurs, Kevin Maréchal (Gembloux Agro-Bio Tech) amène cette notion d’ecological economics, à savoir la capacité de repenser les théories économiques en y intégrant de manière forte ce que nous enseigne la question écologique.

SM : Virginie Xhauflair s’intéresse aux nouvelles pratiques de financement amenés par des philanthropes et des investisseurs à impact. Elle initie les étudiants à différents outils de reporting global. Finalement, Benjamin Huybrechts se focalise sur les innovations sociales qui, à partir d’une compréhension fine des besoins sociétaux, permettent de construire des solutions.

Un mot pour les étudiants ?

SM : Pour nos étudiants, ces formations constituent des opportunités uniques d’être au contact d’une multiplicité d’entreprises et d’expérimentations à la pointe qui leur permettent de manière très concrète de choisir leur manière de penser le management. Finalement, vu les défis sociétaux auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, il faut certainement mesurer la chance que nous avons à HEC d’offrir des formations qui traitent de ces enjeux. Nous voulons faire partie des solutions !

Jonas DEMBOUR,
Chargé de communication, Financité